La lune et la mystique lunaire (2)

La lune et la mystique lunaire (2)

Cet article est une simple recension d’extraits du Traité d’histoire des Religions – Mircea Eliade*

Ce traité est une synthèse des éléments qui constituent les religions primitives comme récentes ; l’organisation n’est ni chronologique ni fonction des grands courants religieux que, a posteriori, nous dessinons aujourd’hui (les polythéismes, les monothéismes etc…). Chaque chapitre propose une synthèse des symboles ou éléments communs aux mythes, croyances et légendes du monde entier, et qui constituent bien souvent le substrat des religions qui, aujourd’hui encore, perdurent.

Vous lirez ici une synthèse de la seconde moitié du chapitre La lune et la mystique lunaire, (les 6 dernières parties)

Symbolisme lunaire

Le serpent est associé symboliquement aux puissances de fécondité, de régénération, d’immortalité par métamorphose, de par son destin lunaire. Mais il faut bien comprendre que loin d’être juxtaposées, ces valeurs sont une : « Saisi à travers les expériences religieuses, le monde se révèle comme une totalité. »

La Lune et la Mort

La lune symbolise également la régénération ; « de nombreuses divinités lunaires sont en même chtoniennes et funéraires (Mên, Perséphone, probablement Hermès, etc. »

Chez les indiens, on trouve l’idée que les morts les plus valeureux s’en vont dans la lune.

Chez les pythagoriciens, la notion d’empyrée uranien est rendue célèbre : « c’est dans la lune que se trouvaient les Champs Elysées, où se reposaient les héros et les Césars (ref. dans Cumont, 184, n.4). « Les îles des bienheureux » et toute la géographie mythique de la mort furent projetées sur les plans célestes : lune, soleil, voie lactée. »

La Lune est cependant perçue comme une étape dans l’attente d’une nouvelle vie.

Nous retrouvons la conception de la lune comme séjour des âmes des morts dans plusieurs témoignages iconographiques assyro-babyloniens, phéniciens, hittites, anatoliens.

« Le symbole funéraire de la demi)lune est fréquent dans l’Europe entière (ibid.213 sq). Cela ne veut pas dire qu’il a été introduit en même temps que les religions romano-orientales à la mode sous l’Empire ; car, en Gaule, par exemple (ibid., 217), la lune était un symbole autochtone utilisé bien avant le contact des romains. La « mode » s’est contentée de ramener à l’actualité des conceptions archaïques en formulant une tradition préhistorique en termes neufs. »

La Lune et L’initiation

La mort n’est pas définitive.

« Une foule de mythes parlent du « message » transmis par la lune aux hommes par l’intermédiaire d’un animal (lièvre, chien, lézard, etc.) et dans lequel elle assure que : « tout comme je peurs et ressuscite, ainsi tu mourras et reviendras à la vie ». Soit pas stupidité, soit par méchanceté, le « messager » communique exactement le contraire et assure que l’homme, à la différence de la lune, ne revivra plus une fois mort. »

Ce mythe est répandu en Afrique et dans les îles Fidji, en Australie etc.

La croyance en la résurrection se retrouve également dans le cadre de l’apologétique chrétienne. Les initiations consistent parfois à simuler une mort (« expérimenter une mort rituelle ») après laquelle l’homme est un « homme nouveau ». Les initiés devaient avoir passé, parfois, 4 jours dans la forêt où leur sont révélés les secrets rituels.

Osiris, une fois mort, est enfermé dans un cercueil et caché. Seth, alors qu’il chassait, le découvre une nuit de lune ; il partage alors le cadavre d’Osiris en 14 morceaux qu’il répand sur tout le territoire égyptien (De Iside, 18).

Symbolisme du « devenir » lunaire

Le « devenir » est la norme lunaire. Qu’il soit observé dans ses moments dramatiques – naissance, plénitude et disparition de l’astre, – ou mis en valeur comme un « fractionnement », une « numération », ou perçu par intuition comme le « chanvre » dont sont ourdis les fils du destin, cela dépend sans doute des capacités mythiques et raisonnantes des diverses peuplades, ainsi que leur niveau culturel. »

« Que la lune « mesure » et « partage », non seulement les étymologies mais encore les classifications archaïques le prouvent. »

Cosmobiologie et physiologie mystique

« Ces homologations ne remplissent pas seulement une fonction classificatrice. Elles ont été obtenues par un effort d’intégration totale de l’homme et du Cosmos dans le même rythme divin. »

Le tissu et le tisserand – « La lune « relie » ensemble, par son mode d’être, une foule immense de réalités et de destins. Harmonies, symétries, assimilations, participations, etc., coordonnées par les rythmes lunaires, constituent un « tissu » sans fin, un « réseau » […] Ce sont des déesses séléniques qui ont inventé la profession de tisserand (comme la divinité égyptienne Neith), ou qui sont célèbre dans l’âge du tissage (Athéna châtie Arachné qui a osé rivaliser avec elle) »

« Evidemment, nous avons affaire à des formes complexes, ayant cristallisé mythes, cérémoniaux et symboles appartenant à des ensembles religieux différents, et qui ne sont pas toujours directement issues de l’intuition de la lune en tant que normes des rythmes cosmiques et support de la vie et de la mort. Par contre, nous trouvons présente les synthèses Lune-Terre-Mère avec tout ce qu’elles signifient (ambivalence bien-mal ; mort-fertilité ; destin). »

Attention, d’autres sont associés et assemblés dans ce réseau.

La lune et le destin

La lune est souvent représentée par une énorme araignée, car tisser ne signifie pas seulement prédestiner, mais aussi réunir ensemble.

« Les Moirai, qui filent les destins, sont des divinités lunaires » Klothô est la fileuse.

« Ce furent probablement, à l’origine, des divinités de la naissance, mais la spéculation ultérieure les a élevées jusqu’à la personnification du destin. »

Fileuse et cueilleuse – « Bien entendu, dans les cultures où les Grandes déesses ont cumulé les vertus de la Lune, de la Terre et de la Végétation, le fuseau et la quenouille avec lesquels elles filent les destins des hommes deviennent, parmi tant d’autres, leurs attributs.

Pensons aussi à Kâla, qui signifie le temps, terme proche de Kâli. Kâla signifie aussi « noir », « assombri », « taché ». « Le temps est noir parce qu’il est irrationnel, dur, sans pitié. Qui vit sous la domination du temps est soumis à des souffrances de toute sorte… » Pour les indiens, nous sommes actuellement dans le kaliyuga, l’âge de Kali.

Métaphysique lunaire

Une vue d’ensemble sur toutes ces hiérophanies lunaires :

  1. a) fertilité (eaux, végétation, femme ; « ancêtre » mythique)
  2. b) régénérateur périodique (symbolisme du serpent et de tous les animaux lunaires ; « homme nouveau », survivant d’une catastrophe aquatique causée par la lune ; mort et résurrection initiatiques ; etc.)
  3. c) « temps » et « destin » (la lune « mesure », « tisse » les destins, « relie » entre eux les plans cosmiques distincts et les réalités hétérogènes)
  4. d) changement, marqué par l’opposition lumière-obscurité (pleine lune-nouvelle lune ; « monde supérieur » et « monde inférieur » ; « frères ennemis », bien et mal) ou par la polarisation être-non être, virtuel-actuel (symbolisme des « latences » : nuit sombre, obscurité, mort, semences et larves).

Dans tous ces thèmes, l’idée dominante est celle du rythme réalisé par la succession des contraires, du « devenir » par la succession des modalités polaires (être-non-être…)

Ainsi arrive-t-on par quantités d’exemples au mythe de l’éternel retour. L’homme se contemple et s’observe dans la lune.

« Si la modalité lunaire est par excellence celle du changement, des rythmes, elle n’en est pas moins celle du retour cyclique ; destin qui blesse et console à la fois, car si les manifestations de la vie sont assez fragiles pour se dissoudre d’une manière fulgurante, elles sont cependant restaurée par « l’éternel retour » que dirige la lune. […] dans certaines tantriques, on poursuit l' »unification » de la lune et du Soleil, c’est-à-dire le dépassement de la polarité, la réintégration dans l’Unité primordiale. »

D’autres mythes « constituent la première tentative faite par l’homme pour dépasser son « mode d’être lunaire ».

Extraits du Traité d’histoire des religions de Mircea Eliade, Chapitre IV, pp. 139 à 164. (Payot)

*Le travail de Mircea Eliade est d’une extrême densité ; une multitude d’exemples variés rendent impossible – et peu pertinent – le simple résumé. Par ailleurs, lorsqu’il décide de rassembler et synthétiser ses idées, cela est écrit d’une façon tellement limpide que je n’ai pas souhaité le paraphraser inutilement ou encore synthétiser une remarque déjà synthétique.

Le cerveau a-t-il un sexe ?

Ci-dessous retranscrit un article avec lequel je ne suis plus totalement en accord. Pour le comprendre, lire aussi ceci.

Neurobiologiste et directrice de recherche à l’institut Pasteur, Catherine Vidal 9782746506251est en guerre contre les stéréotypes véhiculés ces dernières années dans les médias et la télévision : « I faut désintoxiquer les gens de la bêtise ambiante ! » Il faut le savoir, et la neurobiologiste le crie haut et fort : la totalité des arguments cités plus haut*, et repris en boucle dans les médias, sont réfutés depuis longtemps… par la science.

La théorie du corps calleux de 1982 ? (tu mourras moins bête 😉 Invalidée en 1997 par une enquête sur deux mille personnes qui ne montre aucune différence entre hommes et femmes. La femme serait la plus douée pour parler ? Une gigantesque étude menée en 2004 n’a révélé aucune différence entre les sexes concernant les capacités dans ce domaine. la théorie des hémisphères gauche (langage) et droit (représentation spatiale) ? Lancée dans les années 70, avant l’IRM, en pleine mode du yin et du yang, elle est complètement dépassée : l’imagerie cérébrale montre que les deux hémisphères fonctionnent en permanence en interaction, chez les deux sexes. La testostérone rend les hommes agressifs, et l’œstrogène, les femmes émotives et sociables ? Les récents progrès des neurosciences prouvent que l’être humain échappe à la loi des hormones : son cortex surdéveloppé, siège des fonctions cognitives les plus élaborées (langage, conscience, imagination…), n’est guère réceptif aux fluctuations hormonales, contrairement à celui des animaux. La préhistoire et ses atavismes ? Nous n’avons aucune trace de la répartition des tâches chez l’homme préhistorique. Le stéréotype de l’homme chasseur et de la femme au foyer est hérité du XIXè. Claudine Cohen a bien expliqué comment les imaginatifs scientifiques de l’époque ont calqué leur vision de la cellule familiale conservatrice du XIXè sur la préhistoire, et combien ces représentations persistent aujourd’hui.

« Les auteurs des livres qui véhiculent ces clichés ne font pas forcément volontairement de la désinformation, dit la neurobiologiste. Nous baignons dans une culture où le rôle des uns et des autres restent bien différents, marqués. Il y a les métiers d’hommes et de femmes. Inconsciemment, c’est intégré par chacun. Il faut faire un effort intellectuel pour penser autrement ». Les travaux des anthropologues Françoise Héritier en Afrique et Maurice Godelier en Nouvelle-Guinée ont pourtant montré qu’il existe une grande diversité dans la répartition des tâches selon les sociétés. Dans certaines tribus africaines, ce sont les femmes qui marchent des kilomètres tous les jours pour la cueillette et assurent les deux tiers de l’alimentation du groupe. Le mythe de l’homme des cavernes en prend un coup (de gourdin).

Malgré tout, les hommes et les femmes ont bien un cerveau différent. Le sexe génétique de l’embryon (XX et XY) induit la formation des organes sexuels. des hormones sexuelles différentes vont ainsi imprégner le cerveau et influencer la formation des neurones. Mais cela concerne uniquement la reproduction : « Pour tout le reste, toutes les différences de comprotement entre les hommes et es femmes sont essentiellement dues à la société, à la culture et à l’éducation. Pas aux hormones, ni aux gènes » explique Catherine Vidal.

Mais alors, comment expliquer que les chasseurs de gènes, ceux de l’amour romantique, de l’intuition féminine et des préférences sexuels parviennent à faire publier leurs recherches fumeuses dans les meilleures revues scientifiques ? Pour celles-ci, c’est l’assurance de retombées médiatiques. En 1999, une étude sur le « gène » de la fidélité conjugale publiée par l’hebdomadaire Nature défraya la chronique. Il y a aussi les arrières-pensées idéologiques. Nombreux aux États-Unis, présents dans les milieux néoconservateurs, ces chercheurs déterministes estiment que tout est joué à l’avance : les capacités, les défauts, les appétences, la morale. Les méchants naissent méchants. Les hommes incapables de trouver le beurre dans le réfrigérateur. Risque majeur du déterminisme : légitimer l’ordre social par l’ordre naturel. « Les femmes sont nulles en math », lançait peu ou prou Lawrence Summers, le directeur de Harvard, en 2005. Ce fut un tollé : il dut démissionner. Sa pique aura provoqué une nouvelle étude pour faire le point sur la question. Le rapport en a été publié en septembre 2006. Ses conclusions ? ‘Les études sur la structure du cerveau […] ne montre pas de différences entre les sexes qui pourraient expliquer la sous-représentation des femmes dans les professions scientifiques […] : cette situation est le résultat de facteurs individuels, sociaux et culturels. » Ouf !

Alors, hommes, femmes, tous pareils ? Non, tous différents. « Grâce aux nouvelles techniques d’imagerie cérébrale, on sait que la variabilité individuelle l’emporte sur la variabilité entre les sexes. » explique Catherine Vidal. c’est la grande découverte de ces dernières années : la plasticité du cerveau. Avec sa centaine de milliards de neurones plongés dans un bouillonnement électrique permanent, son million de milliards de synapses, il conserve nombre de ses secrets et continue d’alimenter les fantasmes. mais on est sûr d’une chose : il évolue du beceau jusqu’au cercueil. Le bébé naît avec tous ses neurones, mais 90% de ses connexions se feront dans les vingt années après sa naissance. Si les zones qui commandent la main gauche d’un violoniste professionnel ou celles de l’orientation dans l’espace d’un chauffeur de taxi sont surdéveloppées, difficile de l’imputer à un gène. l’expérience forge ce qui bourdonne sous nos fronts. Un jeune garçon sera mis très tôt sur un terrain de foot. Il développera son sens de l’orientation spatiale. Une petite fille habituée à rester à la maison dans une sphère consacrée à l’échange parlera plus vite. Dès sa prime enfance, l’être humain est inconsciemment imprégné d’un schéma identitaire auquel il doit se conformer pour être accepté par le groupe. On ne dit pas à une fille « Que tu es costaude !! », ni à un petit garçon « Que tu es joli ! ».

En définitive, on peut se demander pourquoi des homo sapiens aussi évolués que nous peuvent bien se ruer sur ces best-sellers qui expliquent nos comportements par une biologie de bazar : « Le succès de ces théories tient au fait qu’elles sont rassurantes, répond la neurobiologiste. Elles nous donnent l’illusion de nous comprendre et de nous sentir moins responsable de nos actes, de nos lacunes. »

Il sera plus difficile d’admettre que, non, monsieur, vous n’aurez plus d’excuses pour le beurre dans le frigo ; non, madame, plus d’excuses pour ces satanés créneaux ! Le cerveau évolue : entraînez-le !

TeleramaNicolas Delasalle, journaliste à Télérama, Extrait Télérama, Février 2007 p. 18

* Plus haut, l’article faisait l’inventaire des clichés du style : l’homme bénéficie d’une meilleure capacité d’orientation dans l’espace, la femme est meilleure diplomate, est plus douée pour communiquer. L’homme est désordonné et perd ses affaires : la femme aime que les objets soient rangés, elle est mieux organisée. les hommes conduisent trop vite, les femmes assez mal… etc.

Question subsidiaire : Le sexe a-t-il un cerveau ?

Apollon, un dieu misogyne ?

Peut-on dire qu’Apollon était un dieu misogyne ? Peut-on le dire sous prétexte qu’il est fils de Zeus, le dieu patriarche et dominateur ? Peut-on dire cela parce qu’il est souvent rapproché d’un dieu solaire, par opposition aux déesses lunaires ?

La Naissance de la Tragédie grecquePeut-on le dire parce que Nietzsche, dans La Naissance de la Tragédie (1872) grecque l’oppose à Dionysos, divinité plus proche de la nature non domestiquée et de tout ce que les grecs renvoyaient au féminin ? Ou bien serait-ce au nom du meurtre du serpent Python, meurtre grâce auquel il s’empara de l’oracle de Gaia, la déesse Terre, mère de Chronos le Temps et grand-mère de Zeus et qui fit de lui le dieu de la divination ? Bref, peut-on s’amuser avec les symboles et les analogies ?

Oui, tant qu’on ne lutte pas avec véhémence pour défendre n’importe quelle point de vue au nom de n’importe quelle lubie…

Nous connaissons Apollon le musicien, le joueur de lyre, le chef des neuf muses et leur protecteur ; c’est d’ailleurs de celui-ci qu’il s’agit chez Nietzsche, cet Apollon qui aime l’ordre et le calme, contrairement à Dionysos, dieu de la nature désordonnée et joueur de flûte (enfin d’aulos, sorte de flûte antique à double anche). Mais Apollon le musicien, le solaire, ce qu’on oppose aisément au Dionysos nocturne, ne se dessine sous ce jour qu’à partir du Vème siècle av JC.

Dans l’Iliade, donc un ou deux siècles avant, Apollon est celui qui a construit Troie et qui protège les troyens contre les Grecs qui les assaillent pour reprendre Hélène. C’est du moins la version poétique de l’histoire ou encore le prétexte sexuel, car on parle également d’une guerre dont l’issue aurait permis aux grecs d’élargir leur passage vers l’orient…

Il est déjà clairement le dieu de la divination, don qu’il aurait reçu de Zeus sont père et transmis à plusieurs personnages légendaires, dont Calchas et Cassandre, qui tiennent des rôles importants dans l’Iliade.

Le roman soliloque de Wolf, (Cassandre, Stock, 1983-2003, p.160) l’évoque, cela n’est peut-être pas sans lien avec le meurtre de Python, qui était le gardien de l’oracle de Gaia de Delphes. Les prêtresses, appelées Pythies ou Pythonisses, étaient des prophétesses, comme Cassandre, et pourraient être perçues comme des résurgences de vieilles déesses mères. De ce meurtre ou de cette usurpation, il devient le dieu qui illumine l’esprit, même si ses réponses demeuraient souvent obscures, hermétiques !

Pourquoi cette partie de la légende d’Apollon (dieu solaire) tuant le serpent Python (pour prendre sa place) ne symboliserait-elle pas le passage d’une société matriarcale à une société patriarcale ? Si les prêtresses ou prophétesses pythonisses, sous la tutelle nouvelle d’Apollon (au vu des mythes, cette nouvelle tutelle pourrait dater peut-être du IIème millénaire av JC) étaient les derniers témoins de la persistance des déesses-mères, de la Grande Déesse, depuis lors encadrée par une divinité tutélaire ?

Dans le Traité des religions de Mircea Eliade ((Chapitre La Lune et la mystique lunaire (1)), plusieurs éléments pourraient nous porter à le penser… On y apprend en effet que les humains d’un âge pré-néolithique associaient volontiers la lune, l’eau, la femme et le serpent parce que la lune rythme le temps créant des cycles de naissance, de mort et de renouveau ; qu’elle agit sur les eaux, les marées, la végétation, la fécondité des femmes ; le serpent étant alors perçu comme un symbole de renouveau pour sa mue et un détenteur de science, prophétique et chtonienne, parce qu’il se cache sous terre : il est donc en contact avec les morts, nos ancêtres.

Certains mythes témoignent d’une croyance selon laquelle les femmes auraient enfanté sous l’influence de la lune, l’astre étant perçu comme fécondant les femmes ; d’autres racontent plutôt que c’est le serpent qui serait « l’époux de toutes les femmes ». Cette croyance a même perduré chez les latins sous la forme d’une peur : les femmes ont craint d’être réellement fécondées par des serpents.

L’éviction du serpent, ou sa séparation de la femme, pourrait symboliser la mise à mort de la croyance selon laquelle les femmes, par leur lien mystique avec la lune, l’eau, le serpent, se reproduisent sans l’homme, par des moyens surnaturels, magiques. Changement de temps, changement d’astre de référence ; le dieu solaire (la racine indo-européenne « dies » signifie « dieu ») aurait détrôné la divinité lunaire. Il se trouve qu’une des étymologies possibles d’Apollon serait justement apollumi, détruire.

Apollon le médecin est aussi Apollon le dieu qui dompte le serpent. En vertu de cette (nouvelle ?) association (bénéfique) avec le serpent, Apollon se trouve connecté avec l’art de la divination, certes, mais également avec les morts et les cycles de régénération, comme la réincarnation.

Ah, ce serait trop beau et tellement séduisant quand tout semble coincider ! Cependant, pour défendre un point de vue contraire, rappelons que Dionysos lui est opposé par Nietzsche justement en vertu de son pouvoir destructeur. C’est d’ailleurs sur le même argument que Danielou rapproche le Shiva indien du Dionysos grec (Shiva et Dionysos, 1979).images

Or, dans l’Iliade, Apollon apparaît sous la forme de Lycaon pour convaincre Enée de lutter contre Achille en duel. Est-ce que cette apparition sous forme de loup a elle aussi un sens ?

Christa Wolf (Cassandre, Stock, 1983-2003, p.160) y songe et propose cette réponse : « Le marxiste George Thomson avance dans ses travaux sur l’origine totémique des divinités grecques en partant du culte des morts, un culte clanique dans lequel les morts furent honorés comme des héros et qui, vu le rôle important des animaux et des plantes dans le rituel pré-déiste, avait vraisemblablement un caractère totémique […]

« Certes on admet, écrit Thomson, qu’Apollon Lycée est un dieu-Loup. Mais s’il avait jamais dû être véritablement un loup  » – donc le signe totémique d’un clan – « cela remonte à si loin qu’il n’a pas besoin de passer sa tête par la fenêtre. »

Mais s’il le fait tout de même, on tombe, comme Thomson, sur le serpent, l’animal sacré qui, nourri de gâteaux au miel dans les sanctuaires d’Apollon les plus anciens comme les plus récents, était vénéré dans les maisons minoennes en tant que déesse-serpent, « maitresse du foyer ». Parce que le serpent incarne l’esprit des morts, lui qui change de peau, symbolisant leur vie éternelle :

« Dans la forme du culte du serpent, le totem du clan fut remplacé par un symbole généralisé de la réincarnation. »

L’hypothèse de George Thomson consiste à supposer que, des dizaines de milliers d’années auparavant, dans la horde primitive et le clan, lorsque l’homme vivant de cueillette et d’une chasse rudimentaire, incertaine, il se serait identifié avec l’animal totémique ou la plante totémique en créant le tabou : « Tu ne mangeras pas le totem ! ». C’est alors qu’il avance, preuves à l’appui, l’existence du premier « état social dans lequel les hommes entraient grâce au mariage dans le clan des femmes ». Cette théorie témoigne d’une structure matrilinéaire que le chercheur fonde sur la magie totémique, « apparue au moment décisif où l’être humain s’est séparé du règne animal » et qui représenterait « la mère à l’origine de toute civilisation humaine ». (v. Thomas Mann et Kérényi)

Cet enchevêtrement d’hypothèses, bien que fort passionnant, montre à quel point il peut être dangereux de partir sur une piste… alors que les histoires et légendes, qui n’étaient ni contrôlées par l’écrit, ni figées dès lors qu’une partie d’un groupe humain se séparait de sa matrice, devaient par conséquent être plurielles et mouvantes.

Je ne proposerai donc pas de réponse ou de voix, qui serait le simple fruit de mon imagination ou d’une volonté d’asseoir, à partir d’éléments de mythes ou de légendes.

Même si Eve était peut-être une déesse phénicienne archaïque du monde souterrain, personnifiée par le serpent. Et que le serpent était un symbole de la connaissance.

La lune et la mystique lunaire (1)

Cet article est une recension d’un chapitre du Traité d’histoire des Religions – Mircea Eliade

Ce traité est une synthèse des éléments qui constituent les religions primitives comme récentes ; l’organisation n’est ni chronologique ni fonction des grands courants religieux que, a posteriori, nous dessinons aujourd’hui (les polythéismes, les monothéismes etc…). Chaque chapitre propose une synthèse des symboles ou éléments communs aux mythes, croyances et légendes du monde entier, et qui constituent bien souvent le substrat des religions qui, aujourd’hui encore, perdurent.

Vous lirez ici une synthèse de la première moitié du chapitre La lune et la mystique lunaire, (les 6 premières parties)

La lune et le Temps :

Dans ce Chapitre, Mircea Eliade explique que la lune est un moyen de mesure du Temps concret (par opposition au temps astronomique, pas encore observé avant le néolithique). Preuve en est la racine indo-européenne me « La plus ancinne racine indo-aryenne se rapportant aux astres est celle qui désigne la lune (cf. O; Schrader, Sprachvergl. und Urgeschichte, 2è éd., p. 443 sp ; W. Schultz, Zeitrechnung, p. 12 sq.) : c’est la racine me, qui donne en sanskrit mâmi, « je mesure ». La lune est l’instrument de mesure universel. »

Traces dans les langues indo-européennes : mâs (sanskrit), mâh (avestique), mah (vieux prussien), menu (lituanien), mêna (gothique), méne (grec), mensis (latin).

Or la lune est également, par sa naissance et sa mort que l’on peut observer – en effet, pendant 3 nuits, le ciel reste sans lune – le symbole de l’éternel retour. Elle contrôle également tous les plans cosmiques régis par la loi du devenir : eaux, pluie, végétation, fertilité.

Par analogie ou « rapports de sympathie ou d’équivalence entre ces séries de phénomènes », le même symbolisme ou la même structure relie entre eux la Lune, les Eaux, la Pluie, la fécondité des femmes, celle des animaux, la végétation, le destin des humains après la mort, les cérémonies d’initiation.

« La lune mesure, mais aussi unifie » parce que le cosmos entier est perçu comme régi par ce même dénominateur. « Tout se tient, tout se relie et constitue un ensemble de structure cosmique. » conclut Mircea Eliade.

Solidarité des épiphanies lunaires

Dans ce chapitre, Mircea Eliade rappelle à raison que l’on doit être vigilant en abordant la mystique et la symbolique archaïque et pré-néolithique : les hommes d’avant ne pensent pas comme nous. L’analogie prévaut sur l’analyse (même si, aujourd’hui encore, le procédé analogique est bien répandu). Il demeure difficile pour nous d’appréhender « toute la richesse de nuances et de correspondances qu’implique une quelconque réalité (c’est-à-dire sacralité) cosmique dans la conscience de l’homme archaïque. Pour celui-ci, un symbole lunaire (une amulette, un signe inconographique) non seulement fixe et concentre toutes les forces séléniques agissant dans tous les plans cosmiques – mais encore, l’établit, lui, homme, au cœur de ces forces, faisant croître sa vitalité, le rendant plus réel, lui garantissant une meilleure condition après la mort. »

Il faut donc prendre en compte cette globalité de la perception d’alors, qui n’est plus la nôtre aujourd’hui : « Nous explicitons causalement ce qui a été perçu intuitivement comme un ensemble ».

Ainsi donc « l’homme s’est reconnu dans la « vie » de la lune ».

La Lune et les Eaux

Les Eaux, comme on l’a vu, sont soumises au rythme de la lune : marée, pluie. On trouve des témoignages de cette croyance dans de nombreux mythes répertoriés par Eliade. De ce fait, les Eaux sont considérés comme ce qui engendre le pourrissement et permettent également la régénérescence. Les mythes concernant le déluge raconte ce cycle : « Les mythes diluviens, dans leur grande majorité, révèlent comment a survécu un individu unique, dont descend la nouvelle humanité. Quelque fois, ce survivant – homme ou femme – épouse un animal lunaire qui devient ainsi l’ancêtre mythique du clan ». Mircea Eliade cite l’exemple d’une légende dayak qui s’accouple avec un chien pour donner naissance à une nouvelle humanité. Il existe d’innombrables versions des mythes diluviens.

La Lune et la Végétation

En vertu de son pouvoir destructeur et régénérant, la lune entretient, symboliquement, un lien considéré comme organique avec la végétation. Un très grand nombre de dieux de la fertilité sont aussi des divinités lunaires : Hathor en Egype, Ishtar, Anaïtis en Iran (archaïque).

Mircea Eliade ouvre une parenthèse sur les breuvages magiques qui confèrent parfois l’immortalité, du fait de la synthèse lune-eau-végétation : le soma indien ou l’haoma iranien. L’amrita, l’ambroisie (littéralement an (privé de de) brotos (mort)), comme le soma ont leur prototype céleste réservé aux dieux et héros. L’ancêtre de la potion magique…

La Lune et la Fertilité

« La fertilité des animaux comme celle des plantes est, elle aussi, soumise à la Lune. La relation entre la fécondité de la lune devient parfois quelque peu compliquée, du fait de l’apparition de nouvelles « formes religieuses » – comme la Terre-Mère, les divinités agraires, etc. »

La corne, la fameuse corne d’abondance, est un symbole lunaire de fécondité : « Il est certain que la corne de bovidé est devenue symbole lunaire parce qu’elle rappelle un croissant, c’est-à-dire ‘évolution astrale totale » (Hentze, Mythes et symboles, 96).

Le Serpent : les mythes et légendes relatifs au serpent sont très répandus et très nombreux. Retenons qu’il est parfois « l’époux de toutes les femmes » « Le symbolisme du serpent est d’une polyvalence troublante, mais tous les symboles convergent vers une même idée centrale : il est immortel parce qu’il se régénère, donc c’est une « force » de la lune, et, comme tel, il distribue fécondité, science (prophétie) et même immortalité. D’innombrables mythes évoquent le funeste épisode où le serpent a ravi l’immortalité accordée à l’homme par la divinité. Mais ce sont là des variantes tardives d’un mythe archaïque dans lequel le serpent (ou un monstre marin) garde la source sacrée et celle de l’immortalité (arbre de Vie, Fontaine de Jouvence, Pomme d’or).

Quant au serpent époux de toutes les femmes, on observe une résurgence de cette probable croyance pré-néolithique dans de nombreuses légendes, à ceci près que, de l’ennemi de l’homme-mâle il devient l’ennemi de l’humanité, par un retournement curieux.

« Le cycle menstruel a sans doute contribué à rendre populaire la croyance selon laquelle la lune est le premier époux des femmes. »

Les civilisations amérindiennes présentent le double symbolisme du serpent décoré de « losanges ». « Cet ensemble a sans aucun doute un sens érotique, cependant la coexistence du serpent (phallus) et des losanges formule tout à la fois une idée de dualisme et de réintégration qui est par excellence lunaire, car nous retrouvons ce même motif dans l’iconographie lunaire de la « pluie », de « la lumière et l’obscurité », etc. (Hentze, Objets rituels, 27 sp. et Mythes, 140 sq.).

La Lune, la Femme et le Serpent

Si le serpent est l’époux de toutes les femmes, il est possible qu’il soit devenu une personnification masculine, comme la lune. « La Lune peut avoir aussi une personnification masculine et ophidienne, mais ces personnifications (qui se sont souvent détachées de l’ensemble initial pour suivre une carrière autonome dans le mythe et dans la légende) sont dues en dernier examen à la conception de la lune comme source des réalités vivantes et comme fondement de la fertilité et de la régénération périodique. »

« Les relations entre la femme et le serpent sont multiformes, mais elles ne peuvent en aucun cas être globalement expliquées au moyen d’un symbolisme érotique simpliste. »

la signification de la régénération pourrait être une des plus importantes : « Le serpent est un animal qui se « transforme ». Gressman (Mytische Reste in der Paradieserzählung, « Archiv f. Relig. », X, p. 345-367) a voulu reconnaître en Eve une déesse phénicienne archaïque du monde souterrain, personnifiée par le serpent. On connaît des divinités méditerranéennes représentées tenant un serpent à la main (Artémis arcadienne, Hécate, Perséphone, etc.)

Les cheveux des femmes dans de nombreuses légendes se transforment en serpent, quand elles meurent, quand les cheveux sont sous terre ou bien quand elles sont sous l’influence de la lune.

Le serpent et le savoir : Comme il vit sous terre, il incarne (entre autres bêtes !) l’esprit des morts : « le serpent connaît tous les secrets, est la source de la sagesse, entrevoit le futur. »

Enfin et pour conclure cette partie, retenons : « En tant qu’attribut de la Grande Déesse, le serpent conserve son caractère lunaire (de régénération cyclique) joint au caractère tellurique. » (tellurique : relatif à la terre)

Lien vers La Lune et la mystique lunaire (2) : http://laetitia-pille.com/la-lune-et-la-mystique-lunaire-2

Éviction des femmes (Christa Wolf)

ADN-ZB Rehfeld 27.10.1989 Berlin: Die Schriftstellerin Christa Wolf, wurde 1929 in Landsberg-Warthe (heute Polen), geboren. Sie studierte von 1949-1953 Germanistik in Jena und Leipzig. Anschließend war sie als Redakteurin, wissenschaftliche Mitarbeitern, Lektorin und Cheflektorin tätig. Seit 1962 arbeitet Christa Wolf als freischaffende Schriftstellerin. Aus ihrer Feder erschien u.a. die Bücher "Der geteilte Himmel", "Kindheitsmuster", "Kassandra", "Störfall" und "Sommerstück".

Les femmes sont évincées

À la misogynie parfois ignorée d’Aristote : « Par exemple le caractère est bon quand un homme possède de la bravoure ; pour une femme, en revanche, il ne convient généralement pas qu’elle soit brave et virile, ou même qu’elle inspire la crainte », Christa WOLF répond dans Cassandre (Stock, 1983-2003, p.216) « Inspire la crainte ? Mais à qui donc ? – à l’homme ? Qui lui a confisqué toute éducation, toute activité publique, et bien entendu le droit de vote ? C’est justement à cause de cela. Notre propre expérience nous a appris en tout lieu de craindre ce qu’on exclut et bannit. » : « L’histoire de l’archéologie, elle aussi, jusque tard dans notre siècle, pourrait être racontée comme une épopée masculine, du moins d’après la version qu’en ont donné ses protagonistes. » (Wolf, Cassandre, Stock, 1983-2003, p.87)

Le christianisme et le capitalisme réintègrent les femmes, mais pour quoi faire ?

Christa WOLF (Cassandre, Stock, 1983-2003, p. 174) met en garde contre le retour du christianisme et son lien avec le capitalisme, via la subordination des femmes… à méditer : « ces temps-ci, mon travail a alimenté ces réticences parce que j’ai pris conscience du rôle d’esclave qu’on a attribué pendant des siècles à la femme dans les religions sémito-chrétiennes ; et que ce furent justement ces religions qui fournissent l’arrière-plan idéologique utilisable pour cette discipline, cette ardeur au travail, cette subordination et cette négation de soi-même dont avait besoin le système des manufactures et des usines, le capitalisme naissant. »

Elle émet tout de même des réserves contre les excès des féministes (Cassandre, Stock, 1983-2003, p.186) : « Il n’empêche que nous ne serons pas plus proches de la maturité si le délire de la masculinité est remplacé par le délire de la féminité et si les acquis de la pensée rationnelle, pour la seule raison qu’ils sont d’origine masculine, sont jetés aux orties par les femmes au profit d’une idéalisation des étapes prérationnelles de l’histoire humaine. La tribu, le clan, le sang et le sol : ce ne sont pas avec ces valeurs-là que peuvent renouer l’homme et la femme d’aujourd’hui ; nous sommes bien placés pour savoir qu’au contraire ces slogans peuvent servir de prétextes à d’abominables régressions. »

(merci Danielle et Marie-Aude auxquelles cet article est dédicacé)

La vérité sous le voile

Plus Homo sapiens tu meurs… Homo sapiens que nous sommes, toujours motivés par le goût d’en voir plus et d’en savoir plus, toujours motivés par l’envie d’avoir raison et de convaincre… bonjour !

Je souhaite répondre ici à certains arguments qui ont défendu le port du voile et sa compatibilité avec le combat féministe en occident. Et je pèse mes mots : en occident. Car, nous le savons, dans d’autres pays, être féministe revient à se battre pour travailler, hériter et voter – alors à ce stade, peu importe voile ou pas voile. D’ailleurs, nos arrière-grands-mères portaient des espèces de fichues et ne sortaient jamais en cheveux ! Il faudrait donc admettre la prééminence du hic et nunc, c’est-à-dire, que les événements sont constituants d’une époque et d’un lieu, et qu’ils sont tout à fait contextuels. Parce qu’en effet, il s’agit bien d’une histoire d »occident. Et il s’agit bien du port du voile en occident.

Le premier argument en faveur du port du voile que je souhaite remettre en cause est celui qui consiste à dire, pour le défendre, qu’il n’est pas une obligation prônée par le Coran et qu’il provient même de la tradition chrétienne. Le second argument en faveur du port du voile explique qu’il est une manifestation de la pudeur… Le troisième enfin invoque la laïcité et le droit de porter ce qu’on souhaite sans être inquiété.

Je prends ici le parti de laisser les lecteurs prendre connaissance (ou revoir) certains faits pour se forger une opinion.

J’aimerais donc rappeler que lorsque les grecs conquirent le bassin méditerranéen (vers le 2ème millénaire avant JC et un peu après), certains se heurtèrent à des civilisations où les déesses et les prêtresses étaient des femmes (cf. A l’origine, des femmes déesses), voire les politiques étaient des reines (comme en Afrique du nord) . Que par la suite, une fois installée l’hégémonie grecque depuis des siècles, la démocratie grecque du IVè avant JC maintenait tout de même les femmes avec les esclaves et les enfants loin du droit de vote et de préférence au gynécée dont elles ne sortaient que couvertes. Que le pater familias romain, quelques siècles plus tard, avait droit de vie et de mort sur sa femme et ses enfants. Que dès cette époque, la femme n’a pas d’autre alternative que épouse et mère ou jeune fille vierge (cf Les femmes et le sexe dans la Rome Antique, Virginie Girod, chez Taillandier). Que, dans un contexte aussi contraignant, le message de Jésus a fait beaucoup d’émules parmi les femmes puisqu’il enseignait que les deux âmes sont égales devant dieu. C’était donc un petit progrès pour les femmes. Pour cette raison, les pères de l’Église, ceux qui ont transformé, revu et corrigé le message de Jésus pendant des siècles, sont revenus là-dessus et ont laissé s’exprimer une haine ou une peur des femmes (cf La cité des dames, de Christine de Pizan (stock/MoyenAge) pourtant chrétienne, qui en fait une belle synthèse allégorique), sentiments misogynes hérités de siècles de domination gréco-romaine. Que le Coran, à son tour, a proposé quelques améliorations du sort des femmes mais que certains hommes (des machos misogynes) se sont arrogés le message divin pour finalement revenir à leur obsession : faire taire les femmes.

On constate donc que chez une grande partie des hommes qui accédèrent au pouvoir, et ce depuis des siècles et indépendamment de toute religion, on trouve une peur ancestrale des femmes et la volonté de les faire taire (éliminer 50% des candidats pour un poste, qui n’en rêve pas ?), de les soumettre (il faut se reproduire, qui mieux que leur égale pour s’occuper de la descendance ?), de les cacher (pour qu’elles ne nourrissent pas en leur sein l’enfant d’un autre mâle !!). Certains exigent d’elles depuis au moins 4 millénaires d’être discrètes et de ne pas parler plus fort que leurs hommes, de les aider, de les soutenir, de les regarder avec amour et admiration, certains exigent qu’elles n’attisent pas le désir des autres hommes, par respect pour l’honneur de l’homme, pour l’honneur de la famille. Discrétion, modestie, pudeur. Voilà ce que certains hommes demandent des femmes depuis des centaines d’année, et voilà exactement ce contre quoi les féministes se soulèvent depuis un peu plus d’un siècle… depuis plus longtemps en vérité, depuis le début très certainement.

Oh cela ne concerne pas tous les hommes !! Beaucoup n’ont pas peur des femmes. Beaucoup préfèrent même les voir nues. Parce que faire l’amour, c’est beau et c’est bien, contrairement à ce que d’autres misogynes ont répété aux femmes pendant des siècles, dès fois qu’elles auraient plus de plaisir ou qu’elles en auraient avec d’autres !!

Comment les misogynes ont-ils lutté contre les femmes, pendant des siècles et partout et encore, femmes qui, malgré tout, sont des humains comme les autres et ont beaucoup souffert de ces pressions ? et se sont déjà beaucoup révoltées (L’Assemblée des femmes, Aristophane – Les femmes savantes, Molière) ! C’est très simple, il faut que l’idée vienne d’elles mêmes !! Il suffit de leur expliquer qu’elles sont plus désirables lorsqu’elles sont discrètes, modestes et pudiques ; qu’elles sont aussi plus respectables, qu’elles ne seront point agressées (faux : les femmes voilées subissent tout autant d’agression que les autres, cf le film Les femmes du bus 678, 2010) ; qu’elles remplissent à la perfection leur rôle d’épouse et de mère et que cela est très important pour être une femme accomplie et épanouie.

Et les hommes (les petits mâles macho et misogynes) s’y mettent à plusieurs, par delà les siècle et les frontières : ils vont de l’homme politique qui caquète à l’assemblée nationale française, au législateur musulman qui explique que chacune a le droit de porter ou non le voile, c’est-à-dire d’être pudique ou impudique… en passant par certains philosophes (que pourtant j’admire, mais qui devaient avoir quelques problèmes psychologiques malgré tout : Aristote, Nietzsche « la femme a la profondeur d’une assiette »), en passant par le patron qui rémunère un peu moins cette employée parce que c’est une femme et sans oublier le créateur de mode qui fait défiler des femmes squelettes, ô combien discrètes !

Les féministes en occident se battent contre cela et tâchent de rester vigilantes aujourd’hui encore contre toute atteinte à leur droit, contre tout ce qui commence par « parce que tu es une femme, tu dois…« , contre tout l’essentialisme sexuel (cf Âmes et corps, de Nancy Huston, chez Babel).

Comment, dans ce cas, ne pas être profondément gênée par le port du voile ? non pas parce que c’est musulman (puisque ce n’est pas l’apanage de l’islam cf. Le voile démasqué de Moulay-Bachir BELQAÏD, chez ErickBonnier), non pas parce que c’est leur dieu qui l’a dit et que je suis athée (en effet, peu de femmes musulmanes portent le voile parce qu’elles se prennent pour Jeanne d’Arc et entendent les voix du seigneur), mais tout simplement parce qu’il répond aux attentes du plus médiocre des misogynes : sois discrète, modeste et pudique.

A propos de cette pudeur, mot à mon sens ici dévoyé :  la norme provient d’une moyenne consentie entre plusieurs pratiques diverses et variées : si tout le monde porte du noir, la norme sera de porter du noir. La norme, c’est la majorité. C’est stupide, mais c’est ainsi. Quand une femme porte une jupe qui laisse voir le bas de sa culotte, on ne lui lance pas des pierres, mais on se regarde d’un air entendu : « c’est un peu court non ? » Si un homme dînait torse nu dans un restaurant, on lui demanderait bien de couvrir ce sein que l’on ne saurait voir. C’est ainsi, c’est la norme. Quand une femme se voile en expliquant que c’est par pudeur, elle envoie aux autres femmes le message qu’elles ne sont pas pudiques. Elle fait pencher la norme vers plus de vêtements = plus de pudeur. Or, d’abord, est-ce que la pudeur est seulement une histoire de vêtements ? Les esquimaux sont-ils plus pudiques que les aborigènes ? enfin, est-ce que j’ai envie que l’on finisse par me trouver impudique en décolleté et cheveux dénoués ? non.

Comment, dans ce cas, ne pas interpréter le voile comme une trahison de femmes à femmes ?

Puis je finirai par ce trait constitutif de la civilisation occidentale et qui nous vient des grecs, comme beaucoup de nos traits psychologiques (y compris misogynes) : la vérité se dit en grec a-lêtheia, soit « sans-voile » parce que pour les grecs de l’antiquité archaïque, la vérité, c’est ce qui est découvert et se montre, se voit. Ce sont les yeux qui permettent de distinguer le vrai du faux. Je ne dis pas que c’est bien, que c’est juste, que c’est mieux. Je dis juste que c’est ainsi que nous sommes construits. Mais il y a pire, lêtheia provient de la même racine que Léthée, vous savez, ce fleuve des Enfers qui apporte l’Oubli. Vous êtes morts, on vous couvre de la tête au pied, on vous oublie dans le fleuve du Léthée.

Alors sachant tout cela, bien entendu, loin de moi de prôner l’interdiction du voile en public !! Chacun fait ce qu’il veut, encore heureux ! Mais il faut que chacune sache ce qu’elle porte sur elle quand elle porte un tel symbole en occident et dans une société où le féminisme a cette histoire et cette représentation du voile. Tout le monde porte sur soi des signes distinctifs, tatouage, crête, tee shirt et marques de vêtements hyper visibles ; moi-même, j’ai les cheveux rouges. Tout le monde envoie à son insu ou volontairement des signes qui renseignent sur ce qu’il est !

Bref, il me semble peu envisageable d’être hic et nunc féministe tout en satisfaisant les attentes de la misogynie ancestrale (pas forcément musulmane donc) qui veut que les femmes soient discrètes, modestes et « pudiques ».

Ne confondons pas « pudeur » et quantité de vêtements !

Si l’on revendique la liberté d’afficher sur des vêtements des convictions (idées ou croyances ou goûts !), on ne peut pas refuser à ceux auxquels pourtant cet affichage s’adresse (puisque c’est une extériorisation des idées ou croyances ou goûts) la liberté de s’exprimer en retour.

 

Et si Pythagore avait gagné ?

D’essence divine, et même, de semence supérieure, il fit l’admiration de ses disciples qui, pendant des siècles et jusqu’à nous, dispensèrent sa parole et tout ça, sans écrire une ligne !! De qui s’agit-il ? de Pythagore ! Et si Pythagore avait gagné plutôt que d’autres ?

Pour commencer, nous serions devenus des scientistes avant l’heure, considérant qu’hors le nombre, il n’est rien de connaissable. Nous serions tous d’excellents mathématiciens, sans quoi nous aurions été bannis dans d’autres contrées barbares où les mathématiques n’avaient pas bonne presse… mais alors où ? car non seulement, les dits barbares adoraient les mathématiques ! Mais en sus, les pythagoriciens pensaient que même les barbares avaient une âme : elle était la manifestation de l’harmonie dans la nature, comprenez harmonie au sens d’équilibre entre le pair et l’impair, le limité et l’illimité… bref, les opposés.

En parlant d’opposés, on ne connaît pas de misogynie chez Pythagore. En effet, les femmes aussi ont une âme qui participe du nombre ! Alors si nous étions pythagoriciens et pythagoriciennes, peut-être que les femmes d’aujourd’hui ne se battraient pas pour leur droit : ce ne serait plus un sujet depuis longtemps.

Évidemment, le problème, ce sont les imbéciles fanatiques, comme toujours. Pythagore eut une femme, une disciple, pythonisse, prêtresse d’Apollon, Théanô, originaire de Crète. Ensemble, ils eurent un garçon, Télaugès et une fille, Mya (ou Arignotès, mais c’est assez moche comme prénom, donc optons pour Mya). Cette dernière se maria à Ménon de Crotone et vécut à Crotone (logique), où d’ailleurs son vénérable père vécut lui aussi vingt ans. Et là, ça déconne… les habitants de Crotone, déjà fascinés par la virginité apparemment, comme beaucoup à cette époque et dans le bassin méditerranéen (nous sommes au 6ème siècle avant J.-C., ça part donc de loin) appellent sa maison « sanctuaire de Déméter » (la déesse des moissons), sa rue l’avenue des Muses et elle, tenez-vous bien, la Vierge des vierges, mais aussi la Femme des femmes (mais pas une lesbienne !). C’est-à-dire qu’en vertu de sa vertu, elle était considérée comme plus vierge que les autres et plus femme que les autres. Je vous laisse méditer là-dessus.

Mais revenons aux nombres. Oui, tout le monde connaît le théorème de Pythagore, transmis par Euclide, qui le tient lui-même d’Eudème, qui lui-même prétend le tenir des pythagoriciens… oui, car Pythagore n’a rien écrit, rappelons-le. En revanche, Philolaos, un important pythagoricien et disciple aurait écrit, lui, 3 livres sur la doctrine pythagoricienne, que Platon aurait achetés. Pour se les procurer, il aurait même traversé la mer d’Athènes à l’Italie du sud où les pythagoriciens vivaient. C’est dire si c’était important, mais aussi connu ! Malheureusement, nous n’avons que des fragments des écrits de Philolaos, et nous n’accuserons pas Platon d’avoir voulu se débarrasser de penseurs qui lui auraient fait de l’ombre. Même s’il avait déjà essayé avec d’autres auteurs. Comme Démocrite. Mais chut !

La tradition se poursuit, Platon, Aristote, Aristoxène, un disciple péripatéticien, puis les compilateurs et historiens, néo-pythagoriciens qui proliférèrent comme beaucoup de sectes de toute part dans les quatre siècles autour de 0. Comme de juste, après 7 siècles environ, sans texte de référence fiable (oui, il y a les Vers d’or, dont on sait qu’ils sont parfaitement vérolés), on se souvient soudain de choses parfaitement folles. D’abord, le retour de la vierge, en la personne du nombre 7, ni engendré, ni engendrant, le nombre vierge lui-même et inconçu, parce qu’alliant en lui le pair et l’impair (oui, 3 + 4). Pourquoi 3 + 4, et non pas 3 + 2 ? Parce que si on additionne 1 + 2 + 3 + 4, cela fait 10, le nombre des nombres, la décade intemporelle ! Or 3 et 4 sont la fin de cette suite merveilleuse. Considérez un instant cette beauté. Je vous laisse méditer là-dessus.

Mais cette maîtrise un peu mystique des nombres viendrait des barbares d’Egypte, comme nous le savons tous. Les Égyptiens prétendaient tenir cette science d’Hermès, qu’ils appelaient Thot. Du coup, Pythagore, appelé ainsi parce que la Pythie, une autre prêtresse d’Apollon, avait révélé sa proche naissance à son père venu en consultation, Pythagore serait en réalité le fils d’Hermès ! d’où l’essence divine ! d’où la semence supérieure ! Et de cette ascendance divine, il aurait reçu une cuisse en or, le don d’ubiquité et le souvenir de ses vies antérieures (216 ans, mais n’est-ce pas le minimum pour cumuler le karma d’un Pythagore ?)

Mais après tout, si Pythagore avait gagné, nous trouverions beaucoup de gens pour croire en cette version fantastique des faits, n’est-ce pas ? De même que nous trouverions des gens qui suivraient les préceptes qu’on lui prêta pourtant 6 siècles après sa mort. La preuve : deux siècles seulement après sa mort, des philosophes comme Aristote et ses disciples mettaient déjà en garde contre le degré zéro de recul devant les us et préceptes prétendument pythagoriciens… nous avions déjà un schisme. Ainsi, certains croyaient que les fèves étaient vraiment interdites à la consommation et que Pythagore était végétarien, alors que d’autres se récriaient déjà contre cette fantaisie qui n’avait rien de pythagorique !! Certains croyaient que « Ne pas parler sans lumière » signifiait qu’il fallait se taire dans le noir, que « N’attise pas le feu avec un couteau » signifie que tu pourrais te brûler, imbécile ! que « Ne reste pas assis sur le boisseau » signifie qu’on doit plutôt se poser sur le canapé ou encore que « Ne reçois pas d’hirondelle à la maison » signifie qu’on ne doit pas faire ami-ami avec des oiseaux et encore moins les inviter à dîner.

OK Pythagore n’a pas été persécuté… c’est vrai, il est mort honoré et respecté. Y’a quand même une source qui en doute, mais on va l’étouffer. Cependant, ce fut l’enfer pour ses disciples lorsqu’il quitta, pour un voyage d’étude, sa terre d’élection, l’Italie du sud. Des jaloux, comme Cylon et ses hommes (on peut dire son nom, il ne risque plus rien) fomentèrent contre la secte. Cylon avait cherché à devenir pythagoricien… mais Pythagore lui-même le trouvait trop violent, tumultueux et autoritaire. De rage et de frustration, ses hommes et lui-même poursuivirent, notamment par des incendies, tous les pythagoriciens jusqu’au dernier. Deux réchappèrent et s’enfuirent dans leur ville d’origine, Tarente. Pythagore s’en fut à Métaponte où il finit ses jours. Y’a quand même une source qui prétend que le vénéré maître périt dans les flammes, mais on va l’étouffer. C’est ainsi que la ville de Crotone se trouva avec des fous-furieux à sa tête et périclita. D’ailleurs, qui connaît Crotone aujourd’hui ?

En effet, dans l’ensemble, les pythagoriciens occupaient des postes politiques plutôt importants et faisaient beaucoup pour leur collectivité. Même si Simos a essayé, le pauvre, d’effacer le nom de Pythagore sur une inscription murale, espérant par là s’arroger ses découvertes et son aura… même si Hippase aurait divulgué les secrets de la secte et, comme Judas, se serait ensuite suicidé, regrettant d’avoir tenté de nuire au maître suprême : il se noya. Et puis, comme tout bon politique, Pythagore lui-même fut critiqué. Hérodote, historien contemporain du maître suprême, prétendait qu’il avait tout copié sur les égyptiens. Encore mieux, Héraclite, philosophe contemporain du maître suprême dit (c’est ma préférée) :

« Un savoir universel n’instruit pas l’intellect, sinon il aurait instruit Hésiode et Pythagore »

Alors peut-on dire que le Maître – dont on ne devait pas prononcer le nom… ça vous rappele quelqu’un ? – a totalement échoué quand on enseigne encore son théorème ? 2600 ans de succès pour un morceau de sa doctrine, et quel morceau !! C’est pas si mal ?

Pour le reste des fantaisies qui entourent sa vie et sa doctrine, il fut balayé au début de notre ère par des choses beaucoup plus sérieuses. Je vous laisse méditer là-dessus.

Bientôt :  Et si Mithra avait gagné ? Et si Zarathoustra avait gagné ? Et si Ashera avait gagné (oui, la femme mise au placard de Yahvé) ? Et si Platon et sa République avaient gagné ?

Voir aussi : Et si Hermès Trismégiste avait gagné ?

 

 

à l’origine, des femmes déesses

« Ces idoles du néolithiques, formes féminines fécondes, larges de bassin, heureuses d’enfanter, stade antérieur de la déesse Déméter, la déesse de la Terre et de la Fécondité qu’adoptèrent également les Hellènes. Partout où la science a exploré des grottes, elle a toujours rencontré cette déesse dans les couches les plus profondes, […] les femmes d’aujourd’hui doivent tirer de ce fait une partie de leur fierté et une justification de leurs ambitions, voilà quelque chose qui mérite réflexion. » (Wolf, Cassandre, Stock, 1983-2003, p.92)

On trouve en effet à une certaine époque des déesses féminines qui furent ensuite avalées, amalgamées, assimilées et intégrées dans le panthéon indo-européen qui débarque entre 4000 et 2000 ans avant J.-C.. Le myrte et le lys, fleurs sacrées pour Aphrodite étaient utilisées pour favoriser les accouchements. La colombe, symbole de la déesse de l’Amour, était déjà le symbole d’Eileithya, vieille déesse crétoise, déesse de l’amour, du mariage, de la chasse et de l’agriculture, déesse qui, une fois intégrée au panthéon indo-européen, se disloque en Aphrodite, Héra, Artémis et Déméter. Eileithya trouverait son origine en Anatolie, où elle se nomme Cybèle. L’Aphrodite hittite est Astarté, l’assyrienne est Melitta.

Toutes seront considérées par le judaïsme, le christianisme et l’islam comme des compagnes du diable. Astarté, Ishtar est même le nom d’un diable (d’une diablesse), comme Belzébuth, le surnom caricature de Baal, nom du / d’un diable, dieu concurrent de Yahvé dans le judaïsme primitif.

Mais les vieilles déesses mères n’ont pas attendu les religions du livre pour être avalées et la figure de l’Apollon Lycée (mettre un lien renvoyant à l’article ci-dessous), oriental et proche d’un culte solaire, l’Apollon qui s’est emparé de l’oracle de Delphes en tuant le gardien, le serpent Python pourrait être une trace symbolique dans la mythologie de cette substitution. Désormais les pythonisses sont des prêtresse d’Apollon et rendent ses oracles. On retrouve cependant cette figure du serpent qu’il faut tuer : Hercule à sa naissance tue les serpents déposés dans son lit par… Héra !

Elles présentaient pourtant la panoplie complète (Wolf, Cassandre, Stock, 1983-2003, p.213)

Voici la trinité des anciennes déesses mères

– la claire jeune fille chassant dans les airs (Artémis)

– la déesse femme, dispensant la fécondité, régnant sur la terre et sur la mer, une divinité érotique (Déméter, Aphrodite, Héra, qui s’appelait avant Era = Terre, dont les autres noms sont Gaia et Rhéa : la Grande Mère de la Terre en Crète et au Proche-Orient)

– la vieillarde qui habite dans le monde souterrain, la déesse de la Mort, à qui on doit aussi la renaissance (Io, la déesse vache, un aspect d’Héra, et bien sûr Hécate-Hécube).

Alors que s’est-il passé ?